Sous le masque sacré (2020)

En Afrique, je m’invente des chemins de traverse, faits de rencontres. La photographie est ce qui me relie à l’autre. Nous sommes alors proches, un court instant.
Parfois les masques tombent et je vois dans les regards et derrière les décors ce qui n’est pas exprimé mais ressenti, comme une faille dans la réalité. J’appréhende ainsi un monde qui n’est pas le mien, envoutant, autant familier qu’inconnu.
Ici, je suis le visiteur, mais je participe pour un moment à un rituel, imprégné de mysticisme. Je viens à la rencontre de mes semblables avec mon passé et parfois nos regards se croisent. Par petites touches, autre chose perce à travers le réel, comme une douce étrangeté.
J’emmène mon territoire natal, que je retrouve dans cet ailleurs, si loin, si proche.
Je traverse l’Afrique sub-saharienne, depuis l’Atlantique, jusqu’à la région des Grands Lacs, jusqu’à Tanganyika, lieu de rencontre et de mélange.
Cet itinéraire photographique couvre une dizaine de pays d’Afrique et une période de cinq années (2016 - 2020).

"Alexandre Vigot est un photographe pour qui la photographie est plus que juste un instrument de voyage, plus qu’un esthétisme. C’est du vécu. Du partagé. Et à partager après avec nous, qui les regardons. De son Auvergne natal de son enfance, il va jusqu’à la région des grands Lacs, jusqu’au Tanganyika où il retrouve ses montagnes. Il y va puis il y retourne : et petit à petit, au-delà du décor, au long des routes et des pistes, ont lieu des rencontres des gens car Vigot est essentiellement un photographe humain, à l’écoute des autres, de l’Autre.
Personnellement, je suis très touché par ses portraits : rien de spectaculaire, mais très directs, très francs. Cet homme qui le regarde calmement, silencieusement, il a compris que Vigot était comme un fils, pas un simple voyageur, pas un voleur d’image ni un chercheur de spectaculaire, mais un jeune homme au regard sincère. C’est pour cela que ses photos me parlent.
Aussi, pour moi qui suis pas mal allé en Afrique, essentiellement au Sahel, dans les années 70 du 20ème siècle, dans ses photos je découvre le 21ème siècle : les années ont passé, les pays ont changé. Finalement, à quoi sert la photographie ? à témoigner. Et Alexandre Vigot est un bon exemple de ce partage que procure la photographie : on découvre, on prend des photos, une fois accepté, ce qui est une condition essentielle, et le déroulement de la vie ainsi se partage pour la meilleure des raisons : aimer les autres : c’est de cela que parlent ses photographies, simplement, discrètement, avec modestie, sans paroles nécessaires, la photographie généreuse à l’état pur."
Bernard Plossu